Les troubles musculo-squelettiques ou TMS
Lors du colloque "Quelles qualités de vie au travail ?", l'atelier "Les troubles musculo-squelettiques : une approche globale pour en limiter les impacts" était animé par Christine Stiévenard - l’ARACT nord-Pas de Calais.
Représentant 86% des maladies professionnelles, les troubles musculo-squelettiques (TMS) affectent muscles, tendons, nerfs et articulations. Ils surgissent lorsque les contraintes subies par les articulations sont excessives au regard des capacités fonctionnelles des personnes.
Les TMS regroupent de nombreuses pathologies reconnues dans le cadre de 5 tableaux des maladies professionnelles. Les difficultés et les douleurs ressenties par le salarié engendrent aussi des symptômes pour les entreprises : absentéisme, plaintes pour douleurs, turn over important sur certains postes, déclarations d’inaptitudes professionnelles plus nombreuses.
Les coûts liés aux TMS sont de trois ordres : coûts d’impact sur la performance, coûts indirects et coûts directs.
Cependant, la prévention des TMS s’envisage trop souvent à tort sous le seul angle des équipements et du geste professionnel biomécanique.
Or, les causes des TMS sont bien multifactorielles : environnement, planning, machines et outils, cadences, produits, pauses, organisation de la production sont à prendre en compte. En effet, le geste professionnel se compose bien de trois dimensions : biomécanique (postures, effets, ampli-tude articulaire etc.), mais aussi cognitive (apprentissage du geste réfléchi et pensé), et psychique (sens donné au travail).
La prévention des TMS va donc bien au-delà des seuls équipements : elle doit se penser par rapport aux modalités d’organisation du travail, à l’aménagement spatial et au management. Elle nécessite donc une approche globale :
Prévenir les TMS par une approche globale, c’est :
- conduire la prévention TMS comme les autres projets de l’entreprise
- définir une stratégie
- identifier des acteurs
- définir des objectifs, des indicateurs de suivi et d’évaluation dès la phase de préparation
- impliquer tous les acteurs de l’entreprise, des opérateurs aux dirigeants.
Prévenir les TMS par une approche globale nécessite :
- un engagement fort de la direction
- une démarche pilotée
- une démarche partagée nécessitant une bonne communication et articulation des acteurs
- une démarche concertée par des régulations collectives
- une certaine maturité de l’entreprise sur les questions de la santé au travail.
La démarche peut se résumer en 5 étapes clés :
1- Paramétrer le projet,
2- Surveiller, dépister,
3- Investiguer,
4-Transformer, prévenir,
5- Maîtriser, pérenniser
« partager/discuter/valoriser » :
Application de la démarche à un cas d’entreprise au sein d’une fromagerie de 39 salariés en Sambre Avesnois
Dans un contexte agro-alimentaire particulièrement difficile, cette entreprise familiale engage des investissements pour passer d’un mode de fabrication artisanal à un mode industriel.
Par ailleurs, le licenciement d’un salarié en 2009 pour inaptitude liée aux TMS et les plaintes de douleurs de la part des salariés ont sensibilisé le dirigeant à la prévention des TMS. A l’occasion du projet de mécanisation de la ligne de production, l’entreprise souhaite au départ seulement bénéficier de conseils ergonomiques.
L’accompagnement de ce projet donne lieu à un partenariat avec la DIRECCTE, le Service Santé et Travail de la Région, la CARSAT et l’ARACT Nord Pas de Calais et s’inscrira dans une démarche plus globale de prévention des TMS.
- Une première rencontre avec le médecin du travail, le dirigeant de l’entreprise, le responsable qualité et le responsable sécurité a permis de mesurer l’état d’avancement du projet et de l’investissement.
- Puis l’analyse du travail, le repérage des situations génératrices de TMS s’est opérée à partir d’observations, d’entretiens avec les salariés et des enregistrements vidéo des différentes phases du processus de fabrication.
- Des réunions co-animées AST/CM avec le dirigeant, l’encadrement et l’ensemble des salariés ont permis aux salariés de parler de leur travail avec la direction. Cette démarche participative a permis de recueillir informations et attentes nécessaires à la conception de la nouvelle ligne de production. Des simulations avec les 9 opérateurs et l’encadrement d’abord sur plans du fournisseur puis à l’échelle 1 ont fait émerger les besoins et permis la modification des postes.
Depuis l’automatisation de la ligne, le gain de productivité est de 20% pour l’entreprise, les conditions de travail ont été améliorées et de multiples manutentions ont été supprimées.
Forte de cette expérience, l’entreprise continue dans sa démarche participative avec une réflexion sur l’atelier de conditionnement et un sujet de réflexion avec les salariés sur les perspectives de l’Entreprise à 5 ans... une illustration concrète qui rappelle que les conditions de travail ne se réduisent pas à la validation des choix techniques mais correspondent à une démarche dans laquelle l’ensemble du personnel est mobilisé le plus tôt possible et à chaque étape.